Argumentaire

Argumentaire

À l’ère des usages exponentiels des algorithmes dans tous les domaines du savoir, l’IA s’insère désormais à chaque niveau de l’écosystème de l’information documentaire, du repérage des sources à leur diffusion, en passant par la création, le traitement et l’organisation des connaissances (Subaveerapandiyan, 2023). Dans les bibliothèques universitaires, ces nouveaux dispositifs intelligents reconfigurent les outils de recherche documentaire et les services d’aide aux usagers, ouvrant la voie à des systèmes de recommandation automatisée, à des agents conversationnels pour l’orientation ou encore à des catalogues enrichis par l’IA  (Diouf et al., 2023). De telles innovations promettent une amélioration de l’efficacité dans le traitement de l’information et la personnalisation des services, tout en soulevant des questions sur la pérennité de certaines pratiques traditionnelles de médiation (Bornali, 2024)

Les usagers, de leur côté, développent de nouvelles attentes et perceptions vis-à-vis des bibliothèques à l’ère de l’IA. Habitués aux moteurs de recherche sophistiqués et aux assistants virtuels, étudiants et chercheurs aspirent à des interactions plus intelligentes avec les services documentaires – par exemple via des réponses instantanées et contextualisées à leurs requêtes de recherche.

Cependant, l’adoption de ces technologies suscite aussi des réticences liées à la fiabilité des réponses fournies par l’IA et à la protection des données personnelles. La question se pose de savoir comment les bibliothèques peuvent intégrer l’IA de manière éthique pour enrichir l’expérience usager sans trahir la confiance ni porter atteinte à la vie privée. Ces enjeux sont d’autant plus cruciaux dans le contexte des bibliothèques africaines, où les défis d’infrastructure numérique et de formation du personnel peuvent freiner l’intégration réussie des solutions d’IA (UNESCO, 2019).

Pour les professionnels des bibliothèques, l’IA représente à la fois un levier d’évolution et une source d’incertitudes. D’une part, elle offre des outils capables d’automatiser les tâches routinières – indexation, classification, gestion des collections – libérant ainsi du temps pour des activités à plus forte valeur ajoutée (Cox et al., 2018). D’autre part, l’IA tend à redéfinir les compétences attendues des bibliothécaires, qui doivent désormais maîtriser des notions d’apprentissage automatique, de gestion des données massives et d’évaluation critique des algorithmes. L’équilibre entre l’expertise humaine et l’intelligence artificielle devient un sujet de réflexion central : comment articuler la complémentarité humain-IA dans les pratiques bibliothéconomiques afin de maintenir des services de qualité et une médiation humaniste de l’information scientifique et technique ?

L’impact de l’IA se fait également sentir sur les missions d’enseignement et de recherche associées aux bibliothèques universitaires. En matière d’enseignement, les bibliothèques sont appelées à soutenir l’apprentissage autonome personnalisé grâce à des outils adaptatifs ou tutoriels intelligents, capables d’offrir à chaque étudiant un accompagnement sur mesure dans le développement de ses compétences informationnelles (Zawacki-Richter et al., 2019). L’essor des tuteurs virtuels et des plateformes d’apprentissage pilotées par l’IA ouvre de nouvelles perspectives pour l’autoformation, tout en posant la question de la place de l’humain dans le processus éducatif (KHOMSI et al., 2025). Du côté de la recherche, l’IA peut accélérer les découvertes en facilitant le text and data mining, en identifiant des corrélations au sein de vastes corpus de publications, ou encore en aidant à la génération d’hypothèses de recherche innovantes. Les bibliothèques pourraient ainsi devenir des partenaires actifs de la recherche innovante en fournissant des services d’analyse avancée de l’information scientifique. Il convient toutefois d’examiner comment ces apports techniques transforment la démarche scientifique elle-même et de veiller à ce que l’IA soit utilisée pour augmenter l’intelligence humaine, non s’y substituer de manière aveugle.

Enfin, les transformations induites par l’IA s’accompagnent d’enjeux éthiques, juridiques et de gouvernance des données majeurs. L’éthique de l’IA en bibliothèque interroge la transparence des algorithmes utilisés pour filtrer ou recommander des documents, le respect de l’équité dans l’accès à l’information, ainsi que la responsabilité en cas d’erreur d’une IA conversationnelle fournissant une information scientifique erronée. La gouvernance des données des usagers – par exemple les traces de navigation ou les historiques de recherche – est un point de vigilance : l’exploitation de ces données par des systèmes intelligents doit se faire dans le respect du cadre légal (RGPD et lois nationales) et d’une déontologie centrée sur les droits de l’usager.

De plus, la question de la fiabilité et des biais des modèles d’IA se pose avec acuité : quelles garanties offrir que les systèmes déployés en bibliothèque ne reproduisent pas des discriminations ou des partialités présentes dans les données d’entraînement ? Ces préoccupations rejoignent les nombreux travaux récents visant à établir des principes directeurs pour une IA digne de confiance, prônant notamment la transparence, l’équité, la responsabilité et le respect de la vie privée (Jobin et al., 2019). Les bibliothèques universitaires, en tant qu’institutions dévouées au bien commun, ont un rôle exemplaire à jouer pour traduire ces principes en actions concrètes et pour sensibiliser leurs communautés aux usages raisonnés et critiques de l’intelligence artificielle.

Ce colloque ambitionne d’offrir un espace de réflexion multidisciplinaire autour de ces problématiques. Il s’articulera autour de plusieurs axes thématiques (non limitatifs) qui permettront d’organiser les contributions attendues selon différents angles d’analyse, allant des perceptions des usagers aux considérations stratégiques, techniques et éthiques liées à l’intégration de l’IA dans les bibliothèques universitaires.

Axes thématiques

  • Perceptions et représentations des bibliothèques universitaires à l’ère de l’IA
    Examen des usages, attitudes et attentes des usagers face aux services documentaires augmentés par l’IA, image des bibliothèques à l’heure des chatbots et des moteurs intelligents, etc.
  • Intelligence artificielle et défis de l’intégration dans les BU africaines
    Études de cas, obstacles infrastructurels, initiatives locales et contextuelles pour implémenter l’IA dans les bibliothèques du continent africain, inégalités face à la transformation numérique, etc.
  • Redéfinition des services et pratiques bibliothéconomiques
    Évolution des services de référence, de prêt, de formation des usagers sous l’effet de l’IA ; transformation du travail de bibliothécaire (catalogage automatisé, systèmes de découverte, curation de l’information assistée, bibliothèques hybrides humain-IA), nouvelles compétences professionnelles, etc.
  • IA et apprentissage autonome personnalisé
    Rôle des bibliothèques dans l’émergence de dispositifs d’autoformation intelligents; intégration des tuteurs virtuels, systèmes de recommandation d’ouvrages adaptés au profil de l’apprenant, collaborations bibliothécaires-pédagogues pour développer des parcours personnalisés, etc.
  • IA et recherche innovante
    Contributions de l’IA à la méthodologie de la recherche scientifique appuyée par les bibliothèques ; text mining, fouille de données bibliographiques, outils de science des données mis à disposition des chercheurs, laboratoires d’innovation en bibliothèque, exemples de recherches rendues possibles par des ressources documentaires intelligentes, etc.
  • Enjeux éthiques et juridiques
    Questions de droit et d’éthique autour de l’usage de l’IA en bibliothèque universitaire; protection des données des usagers, propriété intellectuelle des contenus générés ou recommandés par l’IA, transparence des algorithmes de classification de l’information, formation des usagers à la pensée critique face à l’IA, élaboration de politiques d’établissement sur l’IA, etc.

NB : Cette liste d’axes n’est pas exhaustive. Les auteurs peuvent proposer toute communication s’inscrivant dans la thématique générale du colloque, même si elle ne relève pas explicitement d’un des axes ci-dessus, dès lors qu’elle apporte un éclairage pertinent sur « bibliothèques universitaires et IA ».

Formats de communication attendus

Le colloque accueillera plusieurs formats de contributions, en français ou en anglais :

  • Communication orale longue (20 minutes) – Présentation d’une recherche aboutie ou d’une étude approfondie, suivie d’échanges avec le public. Ces communications seront regroupées en sessions thématiques parallèles.
  • Communication orale courte (10 minutes) – Présentation synthétique de travaux en cours, réservée en priorité aux jeunes chercheurs (doctorants, post-doctorants). Ces communications courtes seront intégrées à une table ronde dédiée, favorisant le dialogue et le mentorat scientifique.
  • Poster scientifique – Présentation visuelle affichée lors d’une session spéciale posters. Le poster mettra en valeur une démarche méthodologique, un projet innovant ou une étude de cas liée aux thématiques du colloque (format A0 conseillé). Les auteurs de posters pourront échanger avec les participants lors des sessions de pauses.

Tous les formats de communication feront l’objet d’une sélection rigoureuse par le comité scientifique, selon un processus d’évaluation en double aveugle conforme aux normes académiques en vigueur. Les propositions retenues donneront lieu à une invitation à présenter au colloque, et feront ensuite l’objet (après la conférence) d’une rédaction sous forme d’article, prenant en compte les retours du colloque et des évaluateurs, en vue d’une publication post-colloque dans la Revue sénégalaise des sciences de l’information (RSSI).

Modalités de soumission des propositions

Les auteurs souhaitant contribuer sont invités à soumettre leur proposition à l’adresse mail : bu60ans@ucad.edu.sn (ou, via la plateforme  https://bu60ans.sciencesconf.org ). 

Les propositions, rédigées en français ou en anglais, prendront la forme d’un résumé étendu de 6 000 caractères maximum (espaces et bibliographie compris). Chaque proposition doit comporter :

  • le titre de la communication, l’axe thématique principal concerné, un résumé détaillé exposant la problématique de recherche, la méthodologie et/ou le terrain d’étude, les résultats escomptés (même préliminaires) ainsi que 3 à 5 références bibliographiques significatives.
  • Les auteurs des propositions acceptées seront informés dans les délais indiqués ci-dessous. Ils devront alors préparer, pour le jour du colloque, un support de présentation (diapos, poster, etc.) et pourront se voir demander une version écrite intégrale après le colloque, en vue de la publication. Des consignes éditoriales plus détaillées seront transmises aux auteurs dont les communications sont sélectionnées.

Dates clés à retenir

  • 28 février 2026 – Date limite de soumission des propositions.
  • 15 mars 2026 – Notification des résultats aux auteurs (acceptation ou refus, éventuellement avec demandes de modifications).
  • 30 mars 2026 – Date limite d’envoi des textes intégraux révisés (versions définitives des communications acceptées, en vue de la publication post-colloque).
  • 14-15-16 avril 2026 – Tenue du colloque international à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal).
  • 30 mai 2026 – Publication des articles sélectionnés dans le numéro spécial de la Revue sénégalaise des sciences de l’information.

 

 

Coordination

Pr. Bernard DIONE (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)

Pr. Djibril DIAKHATE (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)

Pr. Sylvestre Kouassi KOUAKOU (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)

 

Comité scientifique

Moustapha MBENGUE

Olivier SAGNA

Adama Aly PAM

Ahmeth NDIAYE

Mor DIEYE

Bouba DIOP

Moussa SAMBA

Aminata KANE

Mohamet Lat DIOP

Mbaye THIAM

Reine Marie MARONE

Mamadou DIARRA

Diéyi DIOUF

François Malick DIOUF

Ibrahima LO

Mohamadou SECK

Mbemba NDIAYE

Ngor GNING

Ndiène NDOUR

 

Comité d’organisation

Mandiaye NDIAYE

Ramatoulaye Dibor POUYE

Hamady GAYE

Awa NDIAYE

Benoît Papa Ibrahima FOFANA

Mame Samba BÂ

Alioune CISSÉ

Fatou FALL

Benjamin Louis Martin DIOUF

Khardiatou KANE

Abdou Karim SALL

Khady Ba BADIANE

Michel Simon NDIAYE

Rokhy Diouf FAYE

Souleymane DIOUF

Cheikh Anomane DIÉMÉ

Astou Diop CISSOKHO

Mansour GUEYE

Khoudia Ndiaye CISSÉ

Amadou Lamine NDIAYE

Souleymane SEYDI

Maïmouna Séne TINE

Bienvenu DJIBA

Nafissatou BAKHOUM

Sokhna Fall NDIAYE

El Hadji Seydou SARR

Ndeye Oumy NDOYE

Ndoumbé Diouf MBACKÉ

Saliou Kaïnack NDOUR

Daouda SOW

Paul Gérard GOMIS

 

Bibliographie

 Bornali, K. (2024). Artificial Intelligence and Library Services. International Journal of Research in Library Science (IJRLS)10(4), 224–229. doi: DOI: 10.26761/IJRLS.10.4.2024.1808

Cox, A. M., Pinfield, S., & Rutter, S. (2019). The intelligent library: Thought leaders’ views on the likely impact of artificial intelligence on academic libraries. Library Hi Tech37(3), 418–435. doi: 10.1108/LHT-08-2018-0105

Diouf, F. M., & Marone, R. marie N. (2023). Conception d’un « chatbot » pour soutenir les services d’information dans les bibliothèques universitaires : Design of a “chatbot” to support information services in university libraries. Journal of Information Sciences22(2), 1–25. doi: 10.34874/IMIST.PRSM/jis-v22i2.41192

Jobin, A., Ienca, M., & Vayena, E. (2019). The global landscape of AI ethics guidelines. Nature Machine Intelligence1(9), 389–399. doi: 10.1038/s42256-019-0088-2

KHOMSI, Y., SOUKRI, I., & KHOMSI, Y. (2025). L’intégration des technologies du numérique dans l’enseignement supérieur et son impact sur la réduction des inégalités: revue de littérature. International Journal of Accounting Finance Auditing Management and Economics6(2), 379–397.

Subaveerapandiyan, A. (2023). Application of Artificial Intelligence (AI) In Libraries and Its Impact on Library Operations Review. Library Philosophy and Practice (e-Journal). Retrieved from https://digitalcommons.unl.edu/libphilprac/7828

UNESCO. (2019). Steering AI and advanced ICTs for knowledge societies: A Rights, Openness, Access, and Multi-stakeholder Perspective. Paris: UNESCO.

Zawacki-Richter, O., Marín, V. I., Bond, M., & Gouverneur, F. (2019). Systematic review of research on artificial intelligence applications in higher education – where are the educators? International Journal of Educational Technology in Higher Education16(1), 39. doi: 10.1186/s41239-019-0171-0

 

Chargement... Chargement...